Nouvelles technologies ne riment pas toujours avec nouvelle organisation

Pubblicato su Le Monde Interactif martedì 5 marzo 2002

Objectifs et priorités peu clairs… une étude révèle que les collectivités locales utilisent mal l’outil informatique.

Le constat est sévère : “L’intégration des technologies de l’information et de la communication (TIC) au sein des collectivités a été en général peu préparée et donc peu accompagnée, elles ont donc connu peu d’améliorations ou de changements de leurs modes de fonctionnement internes. De plus, les outils mis en place, parfois très sophistiqués, sont globalement sous-utilisés.” Pour arriver à ces conclusions, publiées en février, le groupe Bernard Brunhes Consultants, spécialisé en management des ressources humaines, en ingénierie sociale et en développement territorial, a sondé 500 collectivités territoriales, de la commune aux conseils régionaux. Et à la lecture de l’étude, il y a de quoi s’interroger sur la maturité de ces collectivités, pourtant plutôt bien équipées et toutes utilisatrices à des degrés divers d’outils informatiques.

Première lacune, une absence quasi totale de réflexion stratégique autour de ces projets.

A Angers, le maire et les élus locaux ont constitué un groupe de pilotage qui a défini des objectifs précis et opérationnels pour le projet de site Internet ; une mission TIC a été créée pour la réalisation d’un intranet dans la région des Pays de la Loire. Mais ces cas sont isolés, selon Nicolas Bourgeois, consultant, et Valérie Georgeault, directrice de projet, auteurs de l’étude. En général, les dirigeants des collectivités sont rarement à l’origine des propositions dans ce domaine, en particulier quand il s’agit de projet à dimension interne comme le développement de la messagerie ou de l’intranet. “Aujourd’hui l’enjeu organisationnel et managérial des TIC est encore mal perçu par les collectivités territoriales qui conçoivent bien souvent ces outils comme de simples équipements à brancher à côté du téléphone et du fax, et les dirigeants laissent donc assez facilement le pilotage des projets aux experts.”

Cette focalisation sur les aspects techniques conduit souvent à une sous-estimation des possibilités d’amélioration du fonctionnement interne des services. Objectifs peu clairs, priorités mal définies, réflexions méthodologiques inexistantes, flou autour des moyens financiers et humains affectés sont quelques-unes des carences les plus fréquemment rencontrées.

Autre insuffisance révélée par l’enquête, l’usage des TIC dans les collectivités se caractérise par une sous-exploitation globale de leurs potentialités. Pire dans certains cas, des collectivités donnent l’impression de “subir l’outil”. “Des directeurs généraux nous ont confié que “tant que personne ne se plaint, on continue comme ça”” ou “tant que les agents sont satisfaits rien de plus n’est envisagé””, remarquent les auteurs de l’étude. Une logique qui trouve son apothéose dans l’exemple de ce conseil général, qui a engagé l’an dernier une réflexion sur l’approbation interne des TIC… dix ans après leur mise en place !

En dépit de quelques “bonnes pratiques” révélées par l’enquête, la mise en place descendante (du haut de la hiérarchie vers le bas) semble être encore la règle. La consultation du personnel avant un projet organisationnel et sa participation tout au long de sa mise en œuvre restent rares (environ une collectivité sur dix), même si des réunions ont été organisées dans 15 % des collectivités interrogées.

Dans ces conditions, il est peu étonnant que les impacts des nouvelles technologies sur l’organisation du travail soient aujourd’hui décevants. En tout cas vu de l’extérieur. Car, “comme la plupart des collectivités ne s’étaient pas réellement fixé d’objectifs au départ, elles se satisfont de peu de progrès”, souligne l’étude.

En calquant les outils technologiques sur leurs anciens modes d’organisation, les collectivités ont perdu la possibilité de faire le grand saut. Plus du tiers des collectivités affirment par exemple que la messagerie a permis d’améliorer la collaboration entre services. Dans les faits, les consultants du groupe Bernard Brunhes ont constaté que le travail en réseau ou en groupe projet se résume souvent à un échange de mails ou de fichiers informatiques ; seul un tiers des collectivités ayant participé à l’étude dispose d’un outil de “groupware”, permettant effectivement de travailler en commun.

La gestion des ressources humaines est un autre point sur lequel les TIC pourraient avoir un impact important. Mais les responsables locaux n’ont pour l’instant pas su en tirer parti. Aucune des collectivités interrogées n’a ainsi développé d’intranet de ressources humaines. De même, aucune n’a utilisé les TIC pour engager avec ses agents et les partenaires sociaux un dialogue sur le passage aux 35 heures.

L’espoir d’une plus grande transversalité pourrait, dans ses conditions, venir de problématiques complètement indépendantes de l’introduction des TIC. Ainsi la municipalité de Bobigny, afin de mettre en pratique une nouvelle politique de la Ville, a ressenti le besoin de réfléchir sur les habitudes de travail et sur son organisation interne, afin d’identifier les leviers d’actions susceptibles de faire évoluer l’administration communale vers la gestion en mode projet, grâce entre autres à l’utilisation des nouvelles technologies.

Catherine Rollot

Pubblicato su martedì 5 marzo 2002



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